Interview

Halilhodzic : «On a détruit tout ce que nous avons construit en 3 ans, je suis triste pour le peuple algérien»

«L’état d’esprit et l’attachement des joueurs pour la sélection a très vite disparu après notre départ»

Auteur : Moumen Ait Kaci Ali lundi 18 septembre 2017 23:46

C’est incontestablement le sélectionneur qui a laissé le plus grand impact dans les esprits des fans de l’Équipe nationale. Vahid Halilhodzic suscite toujours les regrets du public des Verts. Si certains voient en lui le meilleur sélectionneur de tous les temps, d’autres pensent que depuis son départ l’Algérie a du mal à retrouver sa véritable identité de jeu. Dans cet entretien exclusif, Vahid en véritable gentleman refuse de tirer sur l’ambulance mais évoque quand même avec beaucoup d’amertume la situation dans laquelle se trouve actuellement un groupe qu’il a construit et pour lequel il s’est beaucoup investi. Entretien :

 

Tout d’abord, coach, il ne se passe pas une déconvenue de la sélection algérienne sans que votre nom ne soit évoqué. Autrement dit on regrette encore votre départ, et certains vous ont désigné meilleur sélectionneur qu’a connu l’Algérie. Une réaction ?
(Rires) je suis très heureux et fier. Ça fait plaisir d’entendre cela de vous mais je dois dire que je ne sais pas comment et qui m’a désigné meilleur entraîneur de l’histoire de l’Algérie mais bon, je peux vous dire que je reçois toujours des appels d’amis, de joueurs, de supporteurs, et de certaines personnes avec qui j’ai eu le plaisir de travailler en sélection algérienne. Je reçois aussi des appels de journalistes comme vous (rires). Cela prouve l’affection que me porte encore le peuple algérien. Cela m’honore beaucoup parce que c’est une manière de leur part de me montrer leur gratitude, après le travail effectué en Algérie. Non, franchement, c’est un plaisir et je les remercie du fond du cœur.
L’élimination de l’Algérie du Mondial de Russie a vraiment affecté tout le monde. On n’arrive pas à comprendre comment l’équipe que vous avez construite n’arrive toujours pas à retrouver son jeu, sa grinta…
Effectivement, moi aussi j’étais très triste pour le peuple algérien qui aime profondément son équipe nationale. D’abord je dois dire qu’à mon arrivée le constat a été vite fait. Le stage de Marcoussis m’a montré beaucoup de choses. Ça nous a permis de reconstruire complètement notre équipe. Il y avait des nouveaux joueurs mais ils étaient arrivés avec un bon état d’esprit et surtout beaucoup d’attachement et de respect pour le pays et l’équipe nationale. Malheureusement, très vite après notre départ, tout avait disparu. C’est tout un sacrifice d’un groupe et un travail de trois ans qui sont partis comme ça.  
L’équipe du coup régresse sur le plan du jeu et des résultats. Comment expliquez-vous cela ?
Écoutez, j’avais laissé l’équipe nationale algérienne sur le podium du classement de la CAF. On était aussi 17e mondial dans le classement FIFA, cela n’est pas arrivé comme ça. Malheureusement,  aujourd’hui, il se passe des choses complètement différentes. Je veux dire que beaucoup de choses sont négatives dans cette équipe nationale. Dommage, ils ont détruit tout ce que nous avons fait pendant trois ans.
Qu’est-ce qui ne va pas depuis votre départ, coach Vahid ?
Je refuse d’émettre le moindre commentaire. Je ne suis pas de ceux qui se mettent en avant et attendent les échecs après un départ pour tirer sur l’ambulance. Non, je ne suis pas comme ça. Je suis au courant de tout ce qui se passe mais je ne veux pas en rajouter au risque d’envenimer la situation de la sélection. Tout ce que je peux dire est que c’est vraiment dommage pour cette génération qui avait de grandes possibilités de réaliser des choses énormes. Il y avait du potentiel pour progresser et avancer, je le dis encore une fois, c’est dommage !
Coach, si on revenait à vos débuts en Algérie, ce n’était pas toujours facile. Parlez-nous de votre début de chantier ?
J’ai vécu des moments très intenses avec cette équipe d’Algérie. On a connu beaucoup de bonnes choses durant les 3 ans où j’ai travaillé, on était partis de très loin. Il ne faut pas oublier que j’avais hérité d’une situation catastrophique avec notamment une équipe anéantie par cette défaite subie contre le Maroc sur le score de 4 buts à zéro. C’était une humiliation pour tout le peuple algérien. On était repartis de là, on a beaucoup travaillé et on a été récompensés par une qualification au Mondial du Brésil 2014 avec une participation remarquable. Partout où je voyage on me parle encore de la qualité de jeu montrée par l’équipe d’Algérie. On a été de l’avis de tous l’équipe la plus sympathique de cette Coupe du monde au Brésil.  
Comment avez-vous réussi à métamorphoser une équipe abattue par cette débâcle ?
Vous savez la reconstruction de cette équipe algérienne était basée sur le comportement et la force du groupe. Chacun avait l’obligation d’être derrière l’équipe quel que soit son statut et son importance. On avait mis en place un règlement intérieur que tout le monde devait respecter. On a cherché et ramené des joueurs qui avaient l’envie de travailler, et s’investir à cent pour cent dans notre méthode et nos objectifs.
C’est là que vous avez commencé à faire le tri, des joueurs ont émergé et d’autres sont partis, à l’image de Slimani que vous avez toujours défendu malgré les critiques…
Voilà, Slimani, je suis allé le chercher au CRB, un club juste à côté à Alger. Au départ, tout le monde était contre ma décision mais la suite m’a donné raison. Il était devenu l’un des héros du Mondial 2014. Il avait raté sa CAN mais j’avais toujours confiance en lui parce qu’il avait montré beaucoup de qualités. Là il a beaucoup progressé en club et il est toujours le meilleur buteur de l’Équipe nationale, je parle de cette génération bien sûr. Son passage à vide s’explique par plusieurs facteurs que je ne peux pas dire parce que je ne veux pas me mêler des affaires des entraîneurs.
Qu’est-ce qu’il faut maintenant pour dépasser cette crise, coach Vahid ?
Il faut travailler. En Algérie tout le monde est impatient, ce n’est pas comme ça que vous allez construire sur de bonnes bases. Les Algériens veulent tout refaire tout de suite, cela est impossible. On ne peut pas refaire une équipe nationale en un seul match. Il faut se donner le temps de repartir sur de bonnes bases et bien reconstruire.  
Vous avez tout le temps su protéger votre groupe. Comment faut-il procéder pour y arriver maintenant ?
Il faut mettre un règlement intérieur que tout le monde doit accepter. Tout le monde doit jouer le jeu. Vous savez, quand un entraîneur est réglo avec tout le monde, les joueurs adhèrent et acceptent. Il faut que chaque joueur comprenne que s’il n’est pas là pour son coéquipier ou ne le respecte pas, il doit aller faire dodo même s’il est le meilleur joueur de l’équipe, voilà.  
Vous êtes le premier entraîneur à qualifier trois nations différentes en phase finale de Coupe du monde. Parlez-nous un peu de cet exploit ?
À mon arrivée, j’ai trouvé un grand chantier. Il fallait reconstruire une équipe en fin de cycle. Chose que nous avons bien réalisée en nous appuyant sur un groupe composé de jeunes éléments et quelques cadres. On était dans un groupe solide mais je savais que ça allait se jouer jusqu’au bout malgré quelques faux pas inattendus mais sans grandes conséquences parce qu’on avait quand même bien travaillé pour prendre une certaine avance.
Coach, les fans algériens sont unanimes : ils exigent votre retour, après la Coupe du monde 2018 bien sûr. Un petit mot ?
(Il rit franchement) Écoutez, je suis très fier mais là je crois que je dois vous dire au revoir. Passez le grand bonjour à tout le monde. Je n’oublierai jamais cette affection du peuple algérien envers ma personne.
Coach Vahid, s’il vous plaît, avant de terminer, on sait que vous avez connu beaucoup de moments émouvants en Algérie. Quelle image ou quel souvenir gardez-vous de ce pays ?
Comme je l’ai dit, je garderai jusqu’à ma mort l’image de ces centaines de milliers de supporteurs venus nous féliciter. J’ai connu beaucoup de moments de joie dans ma carrière que ce soit comme joueur ou comme entraîneur mais cet accueil du peuple à notre retour du Mondial brésilien restera le moment le plus fort de ma carrière footballistique. Voir ces milliers de personnes contents et fiers de notre prestation notamment face à l’Allemagne est ma meilleure récompense jusqu’à maintenant, et one, two, three, viva l’Algéie

Publié dans : Halilhodzic

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