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Real Madrid – FC Barcelone, histoire d’un match qui divise l’Espagne et le Monde

Le Clasico est probablement l’affiche la plus attendue par les amateurs de football dans le monde. Retrospective sur l’histoire commune des deux géants du football espagnol.

Auteur : lundi 07 avril 2014 10:10

Si le FC Barcelone et le Real Madrid se livrent en duel dès la première édition de la Liga en 1928/1929, remportée par les Culés, ce n’est qu’à partir des années 40 qu’une vraie tension s’installe entre les deux équipes. Arrivés en 1940, les Catalans comptent 1 titre de Liga et 4 coupes  d’Espagne, pendant que les Madrilènes comptent 2 Ligas et 2 coupes. A l’époque, le principal rival de ces deux clubs n’est autre que leur voisin, l’Espanyol de Barcelone pour les Blaugranas et l’Atletico Madrid pour les Merengues. L'Athletic Bilbao, l'Atletico Madrid et Valence étaient les meilleures équipes espagnoles à l'époque.

Une rivalité sportive marquée par plusieurs évènements

Au début des années 40, coincidant avec l'arrivée du General Franco au pouvoir, va surgir le premier évènement qui instaurera un véritable climat d’hostilité entre les deux équipes. En demi-finales de la Copa Generalisimo de la saison 1942/1943, que l’on connait sous le nom de Copa Del Rey mais que Franco avait renommé en son honneur à l’époque, s’affrontaient Barcelone et Real Madrid. Les Catalans avaient gagné 3-0 à l’aller chez eux. Avant le début du deuxième match, les autorités espagnoles de l’époque sont descendues dans le vestiaire catalan sous les ordres de Franco, qui ne voulait pas voir les catalans disputer la finale de « sa » coupe,  pour faire comprendre aux joueurs du Barça qu’ils devaient perdre la rencontre. Le Real l’emportera finalement par le score mirobolant de 11-1. 

Les années 50 furent marquées par une domination des deux clubs en championnat, mais furent également les années les plus brillantes de l’histoire du Real Madrid, avec 4 titres de Liga à la clé mais surtout 5 Ligue des Champions d’affilée (56, 57, 58, 59, 60). Le Barça remportera 4 Ligas et 5 Copas del Rey. A l’origine de ces succès madrilènes, celui qui est considéré par beaucoup comme le meilleur joueur de l’histoire du club ; Alfredo Di Stefano. Ce que beaucoup ignorent, c’est que Di Stefano était à l’origine prétendu par le Barça, qui le voulait pour remplacer Kubala, joueur historique du club sur le déclin à cause d’un problème de santé. Le club avait un accord avec le joueur et River Plate pour qu’il signe en Catalogne. Arrivé à Barcelone, la Federation Espagnole, sous l’autorité du General Franco interdit le transfert de Di Stefano au Barça, alors que le transfert avait été validé par la FIFA. Santiago Bernabeu, président du Real de l’époque, en profitera pour convaincre l’Argentin de signer chez eux. Un accord avait été proposé pour que le joueur évolue 2 ans sous les couleurs de chaque équipe, mais le Barça avait refusé et donc renoncé aux droits du joueur. S’en sont suivies des années fastes pour le Real Madrid avec Di Stefano à la baguette, qui sait de quoi aurait été faite l’histoire si Di Stefano avait pu signer au Barça comme c’était convenu avant cette intervention extérieure…

Les années 60 seront totalement dominées par le Real qui remportera jusqu’à 8 fois le championnat. Le Barça traverse alors une période de sécheresse totale au niveau des titres,  et ne parviendra pas à finir en première place du championnat de la saison 1959/1960 à la saison 1973/1974 avec l’arrivée de Johan Cruyff, mais le Real continuera à dominer la Liga pendant toute la décennie des 70. Pendant les années 80, le bilan est encore favorable au Real avec 5 Ligas gagnées pour une gagnée par le Barça.

Le début des 1990, pendant lequel les Catalans étaient enfin supérieurs avec l’obtention de 3 titres de Liga et une Ligue des Champions,  accentuera encore plus une rivalité déjà très présente entre les deux équipes, avec cette fois-ci la participation d’un troisième acteur, le club de Tenerife (actuellement en 3eme division). Lors de l’édition 1991/1992 de la Liga, après 37 journées disputées, le Real Madrid se présentait à Tenerife en tant que leader du championnat, deux points devant le FC Barcelone. Le match finira en 3-0 à faveur des locaux, pendant que Barcelone s’imposera face à Bilbao à domicile, s’emparant donc du titre à la dernière journée. Dans les jours qui suivirent, Luis Milla, joueur du Real Madrid à l’époque (et ex joueur du Barça) qui s’était d’ailleurs fait voir refuser un but valable au cours du match, affirmera avoir été approché par un joueur Barcelonais qui lui aurait proposé 40 millions de pesetas pour faire perdre le match à son équipe. Les joueurs de Tenerife auraient également reçu une grosse prime de la part des dirigeants du FC Barcelone.  Le même scénario se produit l’année suivante, lors de la Liga 1992/1993, avec un nouveau déplacement à Tenerife lors de la dernière journée pour les Madrilènes, qui comptaient cette fois un point de plus que les Catalans. Le Real perdra le match 2-0 avec de nombreuses actions polémiques et au moins 2 pénaltys injustement non sifflés. Le Barça s’empare du titre lors de la dernière journée pour la deuxième année consécutive.

Le début des années 2000 marquera une période de transition pendant laquelle ni le Barça ni le Real ne feront partie des principaux protagonistes en championnat, laissant place à des équipes comme le Deportivo ou Valence. Le Real remporte cependant deux Ligue des Champions (2000 et 2002). C’est à partir de la saison 2004/2005 où l’on assistera à un nouveau mano-à-mano en championnat entre les deux équipes, avec depuis cette saison cinq titres de champions pour le Barça et deux deuxièmes places, et trois titres de champions pour le Real et cinq deuxièmes places.

Même si le Clasico semble avoir regagné en tension depuis que les deux équipes sont parmi les meilleures équipes au monde voir sont les deux meilleures et l’arrivée de Mourinho, la tension entre les joueurs semble avoir diminué. Si jusqu’à la moitié des années 2000 le climat en Sélection Espagnole était très tendu à cause des rivalités entre joueurs du Barça et du Real au sein des vestiaires, certains joueurs ont décidé de mettre de côté ces différences pour le bien de l’équipe nationale, Casillas et Xavi, entre autres, sont les principaux artisans de cette réconciliation. Il n’est aujourd’hui pas rare de voir des photos de joueurs du Real et du Barça ensemble sur les réseaux sociaux, où lors d’évènements ou de tournages de publicités.

 

Une rivalité allant au-delà du sportif

 

Outre la rivalité sportive très importante comme nous avons pu le constater dans la partie précédente, ce match est également un des symboles du conflit politique qui oppose Madrid et Barcelone. Même après la mort de Franco, le contexte de rivalité politique entre les deux clubs est resté. Le FC Barcelone a toujours été l’un des grands symboles du catalanisme, d’où le slogan « Més que un club » (plus qu’un club) ; le Barça est une véritable institution en Catalogne en plus d’être un club sportif. L’hymne espagnol est d’ailleurs souvent sifflé par les supporters les plus radicaux du club, lors de la dernière édition de la finale de la Copa del Rey par exemple, et il n’est pas rare de voir des « Senyeras » (drapeau catalan) et des affiches pro-Catalogne et pro-Indépendance dans les travées du Camp Nou.

Le club était un moyen pour les catalans de se sentir vivre, de revendiquer leur culture et leurs idées pendant la dictature du General Franco, qui était contre toute forme de régionalisme et voulait une Espagne centralisée autour de Madrid, et ceci passait par l’interdiction de l’utilisation des langues régionales notamment. Cette situation est encore valable aujourd’hui, chaque succès du Barça est pour les catalans, en plus d’une grande joie sportive, une occasion de voir leur région sur leur sommet du monde. Le club était à l’époque fier d’affirmer son identité catalane pour manifester son opposition au régime Franquiste. Et vice-versa, Franco tentait de nuire au club catalan et à son identité du mieux qu’il pouvait (cf : l’épisode Di Stefano ou l’épisode de la Copa Generalisimo). Il avait par exemple interdit le speaker du stade de parler en catalan. En tant que chef du pouvoir suprême, le General contrôlait bien entendu  les médias nationaux et censurait tout ce qui avait rapport avec la Catalogne. Ainsi, les deux chaines principales du pays, TVE1 et TVE2, ne diffusaient aucun match du FC Barcelone, alors qu’à contrario le Real Madrid était diffusé.

On constate que finalement, les principales affaires à l’origine de cette rivalité sportive sont les conséquences d’actes et de décisions extérieures au sport, touchant au domaine politique. La rivalité féroce entre les deux équipes n’est finalement née qu’avec la prise de pouvoir de Franco qui a ravivé la flamme entre Madrid et Barcelone, premièrement politiquement et ensuite sportivement.

Du côté des joueurs catalans, même si beaucoup sont fiers d'exhiber le drapeau catalan lors de chaque victoire de l'équipe nationale ou du club, on ne retrouve pas ce discours indépendantiste. Seul Oleguer, joueur du Barça au début des années 2000, passé ensuite par l'Ajax, avait cependant affirmé ne pas vouloir jouer pour la Sélection Espagnole. Xavi Hernandez avait été menacé par des radicaux catalans suite à une déclaration pendant les festivités suivant Coupe du Monde 2010 ou celui avait crié "Viva España" au micro devant plusieurs milliers de personnes réunies pour célebrer la victoire à Madrid. 

Si ces dernières années le nationalisme catalan semblait perdre son souffle, la récente crise qui touche l’Espagne a ravivé les volontés de séparatisme dans la région. Pour preuve, le 11 septembre, fête « nationale» de la Catalogne, plus d’un million de Catalans se sont réunis dans les rues de Barcelone pour clamer haut et fort leurs volontés d’indépendance. Peut-être verra-t-on donc de nouvelles manifestations en tribunes lors des prochains Clasicos. A noter également que dimanche soir avant le début du match le Camp Nou sera intégralement vêtus des couleurs du drapeau catalan, le club ayant prévu de déployer une Senyera géante comme tifo.

Publié dans : fc barcelone real madrid

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